Acquisition intracommunautaire (AIC) - définition et règles comptables
Définition générale
Une acquisition intracommunautaire (AIC) est l'achat de biens effectué par un assujetti établi dans un État membre de l'Union européenne auprès d'un fournisseur établi dans un autre État membre. Ce mécanisme concerne uniquement les échanges intracommunautaires de biens et se distingue de l'importation (achat depuis un pays tiers). Sur le plan fiscal, l'AIC est soumise au régime de la TVA du pays de l'acheteur : la taxe est auto-liquidée par l'acquéreur lorsqu'elle n'est pas facturée par le vendeur.
Principes fiscaux essentiels
Pour qu'une opération soit qualifiée d'AIC, plusieurs conditions doivent être réunies : le vendeur et l'acheteur sont chacun établis dans un État membre différent, l'opération porte sur des biens corporels, et le transfert de biens implique un transit intra-UE. Le vendeur n'applique pas de TVA sur la facture si l'acheteur est un assujetti identifié par un numéro de TVA intracommunautaire valide ; l'acheteur déclare et acquitte ensuite la TVA via le mécanisme d'auto-liquidation (reverse charge).
Obligations déclaratives
Les opérations intracommunautaires donnent lieu à des obligations spécifiques :
- Déclaration statistique des échanges (anciennement DEB, remplacée en France depuis 2022 par des dispositifs statistiques et par l'EMBI selon les cas) ;
- Déclaration d'échanges sur le plan TVA (état récapitulatif des clients ou autres exigences selon le pays) ;
- Enregistrement correct des numéros de TVA intracommunautaires des contreparties pour justifier l'exonération à l'export du vendeur.
Des seuils de déclaration statistique peuvent s'appliquer (ex. seuils historiques à prendre en compte pour la DEB/Intrastat). En France, la déclaration devient requise au-delà d'un certain montant d'échanges annuel (valeurs réglementaires à vérifier périodiquement).
Régime de TVA et comptabilisation
Fiscalement, l'acquéreur comptabilise la TVA due sur l'acquisition et, le cas échéant, la récupère simultanément si la taxe est déductible. Sur la déclaration de TVA, l'opération apparaît à la fois en TVA collectée et en TVA déductible, ce qui neutralise généralement l'impact financier pour un assujetti déductible.
Écriture comptable usuelle (exemple chiffré)
Exemple : une entreprise française achète du matériel pour 10 000 EUR HT auprès d'un fournisseur allemand. Taux de TVA applicable en France : 20 %.
- Montant HT : 10 000 EUR
- TVA auto-liquidée : 2 000 EUR (20 %)
Écritures possibles :
- À la réception : débit compte de charge (ou immobilisation) 10 000 EUR ; crédit compte 401 Fournisseurs 10 000 EUR.
- Auto-liquidation TVA : débit 44566 TVA déductible intracommunautaire 2 000 EUR ; crédit 4452 TVA due intracommunautaire 2 000 EUR.
- Paiement fournisseur : débit 401 Fournisseurs 10 000 EUR ; crédit banque 10 000 EUR.
Résultat : la TVA due et la TVA déductible se compensent si l'opération est entièrement déductible.
Cas particuliers et exceptions
Plusieurs situations modifient le traitement :
- Si le fournisseur facture la TVA (erreur ou non-assujetti), l'opération peut être traitée comme une vente domestique et la TVA est alors supportée par le vendeur ; l'acheteur n'auto-liquide pas.
- Les prestations de services entre États membres suivent des règles différentes (lieu de taxation selon nature du service, règles de télécommunications, B2B/B2C, etc.).
- Certaines entreprises bénéficient d'un régime dérogatoire (personnes non redevables, franchise en base, exploitants agricoles au régime forfaitaire) et peuvent, sous conditions (par ex. plafond annuel - typiquement faible, ex. 10 000 EUR), acheter hors taxe sans auto-liquidation.
- La vente à distance intra-UE ou l'utilisation du guichet unique OSS pour les ventes à des consommateurs imposent d'autres obligations.
Exemples pratiques
1) Un commerçant français achète 5 000 EUR HT de marchandises en Belgique et possède un numéro de TVA : le fournisseur belge facture HT, le commerçant auto-liquide la TVA en France et la déduit si redevable. 2) Une PME sous le régime de la franchise en base achète 8 000 EUR HT dans l'UE et remplit les conditions de la dérogation : elle peut parfois bénéficier d'exonération mais doit vérifier les règles nationales applicables.
Points de vigilance
Conserver la preuve de transport intra-UE, valider les numéros de TVA des contreparties, respecter les échéances de déclaration statistique et adapter la comptabilisation selon le régime TVA de l'entreprise (déclarations CA3, CA12, CA12A en France pour différents régimes) sont des obligations opérationnelles et juridiques majeures. En cas de doute, consulter un conseiller fiscal ou le service des douanes/statistiques pour éviter redressements.