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Crédit client

Mise à jour 06/10/2025 Finances

Crédit client - définition, calcul, implications comptables et bonnes pratiques de gestion

Définition synthétique

Le crédit client, également appelé créance client, représente le montant correspondant à des ventes de biens ou des prestations de services déjà livrées ou réalisées par une entreprise, mais qui restent à encaisser car un délai de paiement a été accordé au client. Il s'agit d'une créance exigible figurant à l'actif du bilan et constituant une composante essentielle de la gestion de la trésorerie et du besoin en fonds de roulement (BFR).

Nature juridique et comptable

D'un point de vue juridique, le crédit client naît à l'émission de la facture, lorsque les conditions contractuelles (livraison, acceptation, réalisation de la prestation) sont remplies. Comptablement, la créance est enregistrée dans les comptes clients (compte 411 en comptabilité française) pour son montant TTC. Elle demeure à l'actif tant qu'elle n'est pas réglée ou provisionnée. En parallèle, une dette est, par définition, un engagement de l'entreprise envers ses fournisseurs et s'inscrit au passif; il ne faut pas confondre ces deux notions.

Exemple succinct :

Une entreprise facture 10 000 € TTC à un client avec un délai de paiement de 30 jours. Tant que ce paiement n'est pas effectué, la somme constitue un crédit client inscrit à l'actif.

Délais légaux et pratiques

Les délais de paiement sont négociables entre parties mais peuvent être encadrés par la réglementation sectorielle ou nationale. Par défaut, entre professionnels, un délai de 30 jours après exécution est la règle usuelle; dans certains pays ou secteurs, une limite maximale (par exemple 60 jours à compter de l'émission de la facture) peut s'appliquer. Ces délais doivent être explicités dans les conditions générales de vente ou directement sur la facture.

Cas pratique :

Un fournisseur et un client conviennent d'un délai de 45 jours. Cette clause doit figurer dans les conditions générales de vente signées; elle prime sur le délai standard de 30 jours sauf disposition légale contraire imposant une limite stricte.

Calcul du crédit client en jours

Une manière standard de mesurer l'importance du crédit client consiste à exprimer l'encours clients en nombre de jours de chiffre d'affaires. Deux indicateurs sont fréquemment utilisés :

  • DSO (Days Sales Outstanding) : indique le délai moyen de paiement effectif des clients ;
  • Le ratio crédit client en jours : (Montant TTC des créances clients / Chiffre d'affaires TTC) x 360 (ou 365 selon convention).

Exemple numérique - calcul du ratio

Supposons un chiffre d'affaires TTC annuel de 1 200 000 € et un encours client TTC de 120 000 € à une date donnée :

  • Ratio = (120 000 / 1 200 000) x 360 = 0,1 x 360 = 36 jours.
  • Interprétation : l'entreprise détient l'équivalent de 36 jours de ventes non encaissées.

Exemple numérique - DSO

Si, sur une période de 90 jours, les ventes TTC sont de 300 000 € et les créances moyennes TTC sont de 35 000 €, le DSO se calcule ainsi :

  • DSO = (Créances moyennes / Ventes sur la période) x Nombre de jours = (35 000 / 300 000) x 90 ≈ 10,5 jours.
  • Ce DSO paraît bas et indiquerait des encaissements rapides; l'entreprise doit comparer ce chiffre au délai contractuel moyen.

Impact sur la trésorerie et le BFR

Le crédit client est un déterminant direct du BFR : plus les encours clients augmentent et plus l'entreprise doit mobiliser des ressources pour financer son cycle d'exploitation. Des délais clients longs tendent à accroître les besoins de trésorerie, compliquent les prévisions de trésorerie et peuvent nécessiter des financements externes (ligne de crédit, escompte, affacturage).

Exemple illustratif :

Si l'entreprise voit ses créances augmenter de 200 000 €, elle pourra soit diminuer son trésorerie disponible de 200 000 €, soit augmenter son recours à des emprunts à court terme pour maintenir ses paiements fournisseurs et ses frais d'exploitation.

Risques associés au crédit client

Les principaux risques sont :

  • Le risque d'impayé (insolvabilité du client) ;
  • Le risque de retard de paiement (détérioration du DSO) ;
  • Le risque de concentration (dépendance excessive à quelques gros clients) ;
  • Le risque de fraude documentaire ou contestation (litige commercial).

Conséquences concrètes

Une montée des impayés entraîne des provisions pour créances douteuses, une dégradation des ratios de solvabilité et peut, dans les cas extrêmes, provoquer des tensions sur la trésorerie conduisant à l'utilisation massive d'affacturage ou au besoin de renégocier les conditions fournisseurs.

Mesures de prévention et de protection

La gestion du crédit client repose sur une approche combinant politique commerciale, dispositifs juridiques et outils financiers :

  • Politique de crédit formalisée : critères d'ouverture d'un compte client, plafonds d'encours, segmentation des clients (bon payeur, moyen, risqué), et procédures de validation ;
  • Analyse de la solvabilité : consultation du bilan, ratios financiers, historique de paiement, extraits RCS, score interne ou externe ;
  • Garanties et sûretés : acompte, caution personnelle ou bancaire, lettre de crédit, nantissement des titres, réserve de propriété ;
  • Outils financiers : escompte, affacturage (recours ou non-recours), assurance-crédit, crédit documentaire ;
  • Mécanismes contractuels : clause de réserve de propriété, pénalités de retard, intérêts moratoires, conditions suspensives.

Exemples d'instruments

Affacturage : l'entreprise cède ses factures à un factor qui avance un pourcentage du montant et gère le recouvrement. En affacturage non-recours, le risque d'impayé est transféré au factor. En affacturage avec recours, l'entreprise conserve une partie du risque.

Assurance-crédit : couverture partielle ou totale du risque d'insolvabilité pour certains clients ou marchés, souvent conditionnée par une analyse préalable de la qualité des débiteurs.

Processus opérationnel de gestion du crédit client

La mise en place d'un processus structuré optimise le recouvrement et réduit les risques :

  • Avant-vente : vérification du client, définition du plafond de crédit ;
  • Facturation : exactitude des factures, conformité aux prestations, mention claire des conditions de paiement ;
  • Relances proactives : rappels automatiques, appels téléphoniques, envoi de lettres de mise en demeure ;
  • Escalade : plan d'action (relance amiable, lettre recommandée, saisie conservatoire, procédure judiciaire) ;
  • Provisionnement : comptabilisation des créances douteuses et suivi des plans de provision.

Exemple de calendrier de relance

  • J+1 : envoi de la facture et confirmation électronique ;
  • J+15 avant échéance : rappel cordial automatisé ;
  • À l'échéance (J+0) : alerte interne ;
  • J+7 après échéance : relance écrite ;
  • J+30 après échéance : appel téléphonique et proposition d'échéancier ;
  • J+60 après échéance : mise en demeure, examen du transfert au service contentieux.

Comptabilisation des provisions et traitements des impayés

Deux méthodes de provisionnement coexistent :

  • Provision individuelle : analyse de dossiers clients identifiés comme insolvables et montant estimé de la perte ;
  • Provision collective (statistique) : application d'un taux forfaitaire sur l'encours selon l'ancienneté (méthode par tranches d'aging).

Exemple chiffré de constitution d'une provision

Encours total : 200 000 €. Analyse d'aging montre :

  • 0-30 jours : 120 000 € (taux 0 %)
  • 31-90 jours : 50 000 € (taux 5 % → provision 2 500 €)
  • +90 jours : 30 000 € (taux 30 % → provision 9 000 €)

Provision totale = 2 500 + 9 000 = 11 500 €. Comptabilisation : débit d'une charge et crédit du compte de provision (compte 416 - clients douteux), retrait du montant net en 411.

Indicateurs de suivi et tableaux de bord

Les équipes financières doivent suivre des KPI clairs :

  • DSO ;
  • Taux d'encours / CA ;
  • Montant des impayés (>30, >60, >90 jours) ;
  • Taux de provisionnement ;
  • Concentration clients (top 5, top 10) ;
  • Délais moyens par segment client ou par secteur.

Exemple de lecture

Une augmentation du DSO de 10 jours sur un CA annuel de 2 M€ traduit un besoin de trésorerie additionnel approximatif de (2 000 000 / 360) x 10 ≈ 55 556 € à financer.

Outils technologiques et automatisation

Les logiciels de gestion commerciale et de crédit management permettent :

  • L'automatisation des relances et le suivi des réponses ;
  • La liaison entre facturation, comptabilité et encaissements pour réduire les erreurs ;
  • L'analyse prédictive des comportements de paiement (scoring, scoring dynamique) ;
  • La génération de tableaux d'aging en temps réel et d'alertes sur dépassements de plafond.

Cas d'utilisation pratique

Un logiciel détecte qu'un client dépasse son plafond de crédit et bloque la nouvelle commande en attendant une validation du credit manager; cela évite d'aggraver l'encours et limite le risque global.

Stratégies commerciales liées au crédit client

Les conditions de paiement font partie intégrante de la politique commerciale :

  • Offres pour paiement anticipé (escompte) : par exemple 2 % de réduction si paiement sous 10 jours ;
  • Facturation échelonnée pour gros projets ;
  • Révision périodique des plafonds et des conditions selon le comportement de paiement ;
  • Négociation avec les principaux clients pour équilibrer délais fournisseurs et clients.

Exemple de négociation

Une PME négocie avec un client industriel un découpage de factures en plusieurs échéances, en contrepartie d'un léger rabais commercial ; le résultat est un meilleur flux de trésorerie anticipé et un risque d'impayé réduit.

Quand externaliser le recouvrement ?

Externaliser une partie du recouvrement peut être pertinent lorsque :

  • La volumétrie de factures est élevée et la structure interne ne peut absorber les relances ;
  • Le coût d'opportunité interne est supérieur aux frais d'un prestataire ;
  • Un prestataire spécialisé offre des résultats supérieurs en matière de taux de recouvrement, tout en respectant la relation commerciale du client.

Choix du mode d'externalisation

Affacturage, cabinets de recouvrement amiable, huissiers pour saisies ou recouvrement judiciaire - chaque solution présente un équilibre différent entre coût et transfert du risque.

Bonnes pratiques recommandées

  • Documenter une politique de crédit claire et la communiquer aux parties prenantes ;
  • Mettre en place un scoring client et des plafonds d'encours ;
  • Automatiser la facturation et les relances pour limiter les erreurs ;
  • Former commerciaux et équipes comptables aux conséquences du crédit client ;
  • Utiliser la clause de réserve de propriété lorsque c’est pertinent et légalement applicable ;
  • Considérer l'assurance-crédit pour l'export ou les marchés à risque ;
  • Suivre régulièrement les KPI et ajuster les politiques en fonction des signaux financiers.

Exemples concrets et études de cas

Cas A - PME industrielle :

  • Situation : CA 3 M€, encours clients moyen 450 k€ → ratio ≈ 54 jours ;
  • Action : segmentation client, suppression de 10 % des comptes risqués et recours à l'affacturage sur 70 % du portefeuille ;
  • Résultat : réduction du DSO à 38 jours, amélioration de la trésorerie et baisse des intérêts bancaires.

Cas B - Société de services informatiques :

  • Situation : contrats pluriannuels avec paiements à 60 jours ;
  • Action : mise en place d'un échéancier de facturation mensuelle, offres d'escompte pour règlement anticipé et revue contractuelle ;
  • Résultat : diminution des encours de 20 % et stabilisation du BFR.

Points de vigilance réglementaires et pratiques

Veiller à l'application des règles sur les délais de paiement, à la conformité des conditions générales de vente et à la mention explicite des pénalités de retard. La clause de réserve de propriété doit être rédigée précisément et acceptée par le client pour être opposable.

Note pratique

La facture doit indiquer clairement : la date d'émission, l'échéance, le montant TTC, le taux des pénalités de retard et l'éventuelle indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement. Ces mentions facilitent les actions de recouvrement et renforcent la position de l'entreprise en cas de litige.

Conclusion opérationnelle

Le crédit client est à la fois un levier commercial et une source de risque financier. Sa bonne maîtrise exige une combinaison d'outils analytiques (DSO, aging), de procédures opérationnelles (facturation, relances, provisions), de dispositifs contractuels (réserve de propriété, conditions de paiement) et d'instruments financiers (affacturage, assurance-crédit). En pratique, la mise en place d'une politique de crédit structurée, soutenue par des outils numériques et une gouvernance claire (rôle du credit manager), permet de concilier développement commercial et préservation de la trésorerie.

Checklist rapide pour l'entreprise

  • Formaliser une politique de crédit et des plafonds ;
  • Vérifier la solvabilité avant d'ouvrir un compte ;
  • Automatiser facturation et relances ;
  • Suivre DSO et aging mensuellement ;
  • Prévoir provisions et scénarios de financement ;
  • Recourir à l'assurance-crédit ou à l'affacturage si nécessaire.