Amortisseur électricité : définition et fonctionnement du dispositif d'aide
Définition synthétique
L'amortisseur électricité est un dispositif d'aide publique mis en place en France pour l'année 2023 visant à réduire l'impact de la hausse des prix de l'électricité sur les entreprises consommatrices. Concrètement, l'État compense une partie de la différence entre le prix contractuel de l'électricité (hors frais de transport et hors taxe) et un seuil de référence, cette compensation étant appliquée automatiquement sur la facture par le fournisseur d'énergie. Le dispositif est encadré par le décret n° 2022-1774 du 31 décembre 2022, modifié par le décret n° 2023-61 du 3 février 2023.
Objectifs et périmètre
L'objectif principal de l'amortisseur électricité est d'atténuer l'effet des hausses tarifaires sur les charges opérationnelles des entreprises à forte consommation énergétique, sans concurrencer le bouclier tarifaire réservé à d'autres catégories de consommateurs. Il vise ainsi à préserver la compétitivité des structures économiques, en particulier des petites et moyennes entreprises (PME) et de certaines très petites entreprises (TPE) répondant à des critères précis.
Durée du dispositif
Le dispositif est entré en vigueur le 1er janvier 2023 et, dans sa forme initiale, était prévu pour une application sur l'année civile 2023, avec les modalités issues des décrets cités ci-dessus.
Cadre légal et responsabilités
Le mécanisme est établi par décrets ministériels et s'appuie sur une mise en œuvre opérée par les fournisseurs d'électricité, qui appliquent la réduction directement sur la facture des clients éligibles. L'État rembourse ensuite les fournisseurs via les charges de service public de l'énergie (CSPE ou mécanismes équivalents) selon les modalités prévues par la réglementation.
Bénéficiaires et conditions d'éligibilité
Le dispositif s'adresse principalement aux PME et à certaines TPE qui :
- ne sont pas éligibles au bouclier tarifaire ;
- détiennent un contrat professionnel d'électricité ;
- respectent des critères de taille définis (effectifs, chiffre d'affaires, bilan), et, pour certaines TPE, des conditions sur la puissance de compteur et la période de signature du contrat.
De façon détaillée, sont visées :
- les PME : moins de 250 salariés, chiffre d'affaires < 50 M€, bilan < 43 M€;
- les TPE spécifiques : moins de 10 salariés, chiffre d'affaires ≈ 2 M€, et un compteur électrique d'une puissance supérieure à 36 kVA, avec contrat de fourniture signé ou renouvelé entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2022 dans les conditions prévues pour 2023.
Exclusions et conditions négatives
Sont exclus les acteurs en situation de procédure collective (sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire) ou présentant des dettes fiscales ou sociales non régularisées au 31 décembre 2021, sauf si ces dettes ont été remises, réglées ultérieurement ou font l'objet d'un plan de paiement en cours au moment de l'instruction. Les dettes fiscales inférieures ou égales à 1 500 € ou celles en litige au 1er avril 2022 peuvent faire l'objet d'exclusions particulières, selon les règles détaillées par le texte réglementaire.
Modalités de calcul et plafonds
Le calcul de l'aide repose sur trois éléments essentiels :
- le prix payé pour la composante énergie du contrat (P), exprimé en €/MWh, hors frais de transport et hors TVA ;
- le volume consommé Q, exprimé en MWh ;
- les seuils et plafonds prévus par la réglementation (valeurs en €/MWh).
La formule générale retenue est la suivante :
Montant de l'aide = 50% × Q × max(0, P - 180 €/MWh).
Cette aide s'applique sur 50% du volume consommé et se calcule sur la différence entre le prix contractuel et un seuil de 180 €/MWh. Des plafonds unitaires et globaux encadrent cependant l'aide : l'aide unitaire ne peut excéder une valeur maximale par MWh (valeur réglementaire), et au-delà d'un certain niveau de prix (ex. 500 €/MWh), la réduction devient constante. Les décrets précisent ces limites et mécanismes de lissage.
Cas particulier des TPE contractées en 2022
Pour les TPE ayant signé ou renouvelé leur contrat pour 2023 entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2022, et si la part variable annuelle moyenne dépasse 280 €/MWh, une modalité spécifique permet de ramener le prix annuel moyen à une valeur cible (par exemple 230 €/MWh) sur l'ensemble des volumes consommés, sous réserve des plafonds applicables. Cette disposition vise à protéger les TPE ayant souscrit des contrats sur la période concernée.
Exemples pratiques de calcul
Exemple 1 - PME : entreprise A consomme 1 000 MWh sur l'année 2023. Son prix moyen (hors transport et HT) est P = 300 €/MWh.
- Différence P - 180 = 120 €/MWh.
- Portion couverte = 50% × Q = 0,5 × 1 000 = 500 MWh.
- Montant de l'aide = 50% × 1 000 × 120 = 0,5 × 1 000 × 120 = 60 000 €.
Note : si un plafond unitaire s'applique (par ex. 320 €/MWh pour la partie prise en charge), la différence prise en compte serait limitée en conséquence ; dans notre exemple, la différence est inférieure au plafond unitaire, donc la formule s'applique intégralement.
Exemple 2 - TPE avec contrat signé en 2022 : entreprise B consomme 50 MWh et a un prix moyen P = 350 €/MWh. Elle remplit les conditions pour le régime spécifique.
- Selon la règle générale, différence = 170 €/MWh ; portion couverte = 25 MWh ; aide brute = 0,5 × 50 × 170 = 4 250 €.
- Si la modalité spécifique TPE ramène le prix moyen à 230 €/MWh sur l'ensemble des volumes, la réduction effective sur le prix unitaire est différente et ajustée par le fournisseur selon la convention réglementaire et le plafond applicable.
Modalités pratiques - démarches et facturation
Pour bénéficier de l'amortisseur électricité, l'entreprise doit fournir, selon son cas, une attestation sur l'honneur au fournisseur d'électricité confirmant qu'elle remplit les conditions d'éligibilité et n'est pas couverte par le bouclier tarifaire. Cette attestation peut être transmise sous forme électronique via l'espace client du fournisseur ou sur sa messagerie sécurisée lorsque le fournisseur le permet. Une fois validée, la remise est appliquée directement sur la facture et l'État rembourse le fournisseur ultérieurement.
Rôle du fournisseur et vérifications
Le fournisseur calcule la réduction conformément aux règles, l'inscrit sur la facture et conserve les justificatifs fournis par l'entreprise. Il est aussi responsable du suivi administratif vis-à-vis des services de l'État pour obtenir la compensation. L'administration peut contrôler a posteriori l'éligibilité des bénéficiaires et demander des justificatifs complémentaires.
Limites, interactions avec d'autres dispositifs et points de vigilance
L'amortisseur électricité ne se cumule pas automatiquement avec tous les autres mécanismes d'aide ; il est conçu pour compléter des dispositifs existants tout en évitant les doubles aides injustifiées. En particulier, il s'applique aux entreprises non couvertes par le bouclier tarifaire. Les entreprises doivent veiller à la conformité de leurs déclarations, car des régularisations sont possibles en cas d'erreur ou de contrôle ultérieur.
Autres points de vigilance :
- bien vérifier que le prix pris en compte est bien la part énergie hors TURPE et hors taxes ;
- surveiller la période de validité du dispositif et les éventuelles prolongations ou adaptations réglementaires ;
- conserver les preuves de consommation et contrats pour faciliter les contrôles.
Cas pratiques et recommandations pour les entreprises
Recommandations opérationnelles :
- vérifier dès la réception de la facture que la réduction prévue apparaît et qu'elle correspond au calcul réglementaire ;
- préparer l'attestation sur l'honneur et les justificatifs de situation financière demandés potentiellements par le fournisseur ;
- si vous êtes en procédure collective ou avez des dettes, consulter un conseiller juridique ou un expert-comptable avant de faire la demande d'attestation ;
- conserver l'ensemble des contrats, factures et échanges avec le fournisseur pendant la durée des contrôles administratifs.
Exemple de contrôle préalable : une PME qui constate une absence de remise doit contacter son fournisseur en fournissant l'attestation et, si besoin, demander une régularisation. Si le fournisseur refuse de l'appliquer alors que l'entreprise répond aux critères, l'entreprise peut solliciter un médiateur ou l'administration compétente pour vérification.
Synthèse et points clés
L'amortisseur électricité est une mesure ciblée, limitée dans le temps (année 2023 dans sa réglementation initiale), destinée à alléger les coûts énergétiques des entreprises non couvertes par le bouclier tarifaire. L'aide concerne 50% des volumes consommés, avec un seuil de référence à 180 €/MWh et des plafonds unitaires et globaux fixés par décret. La démarche pour l'entreprise est relativement simple (attestation), la réduction étant appliquée par le fournisseur et compensée par l'État.
Références
Les modalités pratiques et juridiques précises sont décrites dans le décret n° 2022-1774 du 31 décembre 2022 et ses modifications (notamment le décret n° 2023-61 du 3 février 2023). Pour une application précise à un cas particulier, il est conseillé de consulter le texte réglementaire et de se rapprocher de son fournisseur ou d'un conseil juridique spécialisé.