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Droit à l’oubli

Mise à jour 06/10/2025 Web

Droit à l’oubli (web) : définition et portée

Définition synthétique

Le droit à l’oubli, également appelé droit à l’effacement ou, dans sa pratique spécifique aux moteurs de recherche, déréférencement, désigne la faculté pour une personne physique de demander la suppression ou la limitation de l'affichage de données la concernant sur Internet. Ce droit vise à permettre la maîtrise de son image et de ses données personnelles lorsque leur conservation ou leur accès n’est plus justifié au regard du temps, de l’absence d’intérêt public, ou parce qu’elles ont été collectées illicitement.

Cadre légal et acteurs

Le droit s’enracine principalement dans le règlement européen sur la protection des données (RGPD) et dans la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (affaire dite "Google Spain", 2014). Il implique plusieurs acteurs : la personne concernée (requérante), le responsable de traitement (éditeur du site) et les moteurs de recherche (intermédiaires qui peuvent déréférencer des URL). En France, la CNIL met en œuvre des lignes directrices pour l’appréciation des demandes et peut être saisie en cas de refus ou d’inaction.

Champ d’application

Le droit s’applique prioritairement aux personnes physiques relevant du droit de l’Union européenne. Les mentions concernant des personnes morales (entreprises) ne relèvent généralement pas du droit à l’effacement au titre du RGPD, même si des demandes de déréférencement concernant des entités peuvent être examinées selon d’autres motifs juridiques. Les catégories de données concernées vont des informations d’état civil aux données sensibles, en passant par les articles de presse, photos et résultats judiciaires.

Critères d’acceptation (principes)

La recevabilité d’une demande de déréférencement repose sur un équilibre entre :

  • le caractère personnel et périmé de l’information (ancienneté, inexactitude) ;
  • l’absence d’intérêt public à la conservation et à la diffusion de l’information ;
  • la nature sensible des données et le risque de préjudice pour la personne (diffamation, mise en danger) ;
  • le mode d’obtention (illicite ou non) de l’information ;
  • les obligations légales de conservation ou de transparence (ex. intérêt public, sécurité juridique).

Procédure pratique et délais

Étapes usuelles pour exercer le droit à l’oubli :

  • identifier précisément les URL à déréférencer et rassembler les preuves (captures d’écran, copies) ;
  • remplir le formulaire de demande du moteur de recherche ou adresser une demande au responsable de publication ;
  • joindre une preuve d’identité et une justification motivée au regard des critères ci-dessus ;
  • conserver l’accusé de réception et toutes les traces de la démarche ;
  • en cas de refus ou d’inaction, saisir la CNIL puis, si nécessaire, la voie judiciaire.

Les moteurs de recherche répondent généralement sous un mois, délai susceptible d’extension de deux mois si le dossier est complexe (soit un maximum de trois mois). La CNIL peut intervenir et imposer des mesures ou sanctions en cas de manquement.

Exceptions et limites

Le droit à l’oubli n’est pas absolu. Il cède devant :

  • la liberté d’expression et d’information (presse, archives publiques) ;
  • l’intérêt public à la conservation d’informations (personnalités publiques, enjeux sanitaires, sécurité) ;
  • les obligations légales de conservation de données (comptabilité, décisions de justice publiées) ;
  • les situations où la suppression empêcherait l’exercice de droits d’autrui.

Exemples concrets et cas pratiques

  • Article de journal évoquant une condamnation datant de 20 ans et totalement réhabilitée : la personne peut obtenir le déréférencement si l’intérêt public est faible et la publication porte préjudice.
  • Photo intime diffusée suite à un piratage : demande d’effacement prioritaire et généralement recevable pour cause d’obtention illicite et atteinte grave à la vie privée.
  • Annonce professionnelle ancienne montrant une procédure disciplinaire concernant une personnalité publique : la demande peut être rejetée si l’information reste d’intérêt public.
  • Entreprise souhaitant supprimer une critique : le droit à l’oubli ne s’applique pas aux personnes morales ; la voie de droit commun (diffamation, demande de retrait) doit être privilégiée.

Conseils opérationnels

Avant de déposer une demande de déréférencement, privilégier la suppression à la source lorsque possible (contacter l’éditeur du site). Documenter chaque étape, conserver les preuves, prioriser les URL les plus préjudiciables et préparer une justification factuelle au regard des critères de la CNIL. Pour les responsables de sites, mettre en place des mécanismes de conservation minimale, des mentions de durée de conservation et des procédures de réponse aux demandes facilitera la conformité au RGPD.