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Harcèlement moral

Mise à jour 06/10/2025 Emploi

Harcèlement moral : définition professionnelle et cadre opérationnel

Définition

Le harcèlement moral au travail désigne l'ensemble des agissements répétés, verbaux, non verbaux ou physiques, qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible d'altérer la santé physique ou mentale d'une personne, de compromettre ses droits et sa dignité ou d'altérer sa carrière professionnelle. Ce comportement peut être exercé par un supérieur hiérarchique, un collègue, un subordonné ou un groupe de personnes et concerne tout salarié quel que soit son statut (stagiaire, intérimaire, apprenti, CDD, CDI).

Cadre légal et responsabilités

Le Code du travail et le Code pénal encadrent le harcèlement moral. L'employeur a une obligation générale de prévention et de sécurité de résultat vis-à-vis de ses salariés : il doit prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir, faire cesser et sanctionner les situations de harcèlement. La victime peut saisir le conseil de prud'hommes pour manquement de l'employeur à son obligation de protection et/ou porter plainte pénalement contre l'auteur des faits. Le délai de saisine du conseil de prud'hommes pour certains préjudices peut atteindre cinq ans ; en parallèle, la prescription pénale varie selon le type d'infraction. Noter que l'accusation mensongère pour nuire est elle-même répréhensible.

Eléments constitutifs et preuve

Pour caractériser le harcèlement moral, il faut généralement établir :

  • la répétition des agissements (isolés ou ponctuels sont insuffisants) ;
  • l'existence d'un effet sur la santé physique ou mentale ou sur les conditions de travail ;
  • le lien de causalité entre les agissements et la dégradation observée.

La preuve peut se fonder sur des messages électroniques, comptes rendus, témoignages, certificats médicaux, évolution de l'affectation de poste, évaluations anormales ou tout élément objectif démontrant la répétition et les conséquences.

Exemples concrets et cas pratiques

Des exemples illustratifs aident à repérer des situations :

  • Un responsable qui humilie systématiquement un salarié en réunion, le ridiculise devant ses pairs et dévalorise ses compétences - cas typique de harcèlement par humiliation.
  • La redistribution lente et injustifiée des tâches, l'isolement organisationnel (exclusion des réunions), le retrait d'outils de travail essentiels induisant une impossibilité de réaliser le travail demandé.
  • Imposer des objectifs irréalistes de façon répétée, encourager l'erreur pour sanctionner, ou multiplier les remarques stigmatisantes en lien avec l'âge, le sexe, ou la situation personnelle.
  • Campagnes de rumeurs initiées par un groupe visant à discréditer une personne et à entraver sa carrière.

Cas pratique : un salarié constate qu'il est systématiquement exclu des échanges d'information, reçoit des objectifs disproportionnés et se voit retirer des responsabilités sans justification. Il conserve ses échanges écrits, obtient un certificat médical attestant d'un syndrome anxieux et sollicite le CSE avant de saisir le conseil de prud'hommes. Ces éléments étayent la caractérisation du harcèlement.

Obligations opérationnelles de l'employeur

L'employeur doit :

  • mettre en place une politique de prévention (procédures internes, formation des managers, information des salariés) ;
  • réagir dès la connaissance d'une situation : ouvrir une enquête, protéger la victime, prendre des mesures conservatoires si nécessaire ;
  • proposer des dispositifs de résolution (entretien, médiation si la victime l'accepte) ;
  • sanctionner les auteurs si les faits sont avérés et réparer le préjudice subi par la victime (réintégration, mesures de compensation, indemnités).

Lorsque le harceleur est l'employeur lui-même, la victime peut s'adresser aux représentants du personnel (CSE), à l'inspection du travail ou saisir directement la justice.

Voies de recours et sanctions

La victime peut cumuler plusieurs voies : saisine du conseil de prud'hommes pour manquement de l'employeur et action pénale contre l'auteur des faits. Les sanctions pénales peuvent aller jusqu'à des peines d'emprisonnement et des amendes, tandis que la juridiction prud'homale peut prononcer des dommages et intérêts, la requalification d'actes et des mesures de réparation. La médiation est possible mais ne doit pas se substituer à la protection effective de la victime ; elle requiert l'accord de cette dernière et doit préserver sa sécurité.

Prévention et bonnes pratiques

La prévention combine formation des managers, dispositifs d'alerte clairs, protocoles d'enquête impartiaux, accompagnement médical et psychologique des victimes, et sanctions proportionnées. Les entreprises performantes maintiennent un registre des signalements, veillent à la rotation et à l'organisation du travail pour éviter les situations de vulnérabilité, et favorisent une culture de respect par des communications régulières.

Conclusion

Le harcèlement moral est une atteinte grave à la personne et à la sécurité psychologique au travail. La prévention, la détection précoce, la preuve rigoureuse et l'intervention rapide de l'employeur sont des leviers essentiels pour protéger les salariés et limiter les conséquences juridiques et humaines pour l'entreprise.