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Homme du métier

Mise à jour 06/10/2025 Marque et brevet

Homme du métier : définition et rôle en matière de brevets

Définition

Le terme Homme du métier désigne, dans le domaine de la propriété industrielle, la personne fictive ou hypothétique qui représente le spécialiste moyen d'un secteur technique donné. Il s'agit d'un concept juridique-utilisé pour apprécier deux critères essentiels d'une demande de brevet : la activité inventive et la suffisance de la description. Cette figure n'est pas une personne réelle mais un référentiel objectif permettant aux offices et aux juridictions d'évaluer si une invention dépasse ce que le spécialiste moyen saurait déduire ou réaliser sans effort inventif.

Attributs et caractéristiques

La personne du métier possède un niveau de compétence technique ordinaire pour le domaine concerné : elle a des connaissances et des aptitudes moyennes, maîtrise les techniques courantes et les outils standards, mais n'a pas de capacité inventive ou de créativité exceptionnelle. Ses attributs se résument ainsi :

  • Formation et expérience usuelles dans le domaine technique visé.
  • Accès à la connaissance générale et aux publications publiques antérieures (l'état de la technique).
  • Capacité à effectuer des opérations routinières, des essais standard et des adaptations connues sans imagination inventive.
  • Non-inventivité : la personne n'invente pas ; elle combine ou applique des moyens connus de façon attendue.

Comment cette figure est déterminée

La loi ne définit pas précisément le profil ; la jurisprudence et la pratique des offices (par ex. INPI, EPO) établissent le standard en fonction du secteur technique et de la nature du problème à résoudre. Les critères retenus varient selon la complexité : un procédé pharmaceutique exigera des connaissances différentes d'un assemblage mécanique.

Rôle procédural et méthodologique

Lors de l'examen d'une demande de brevet, l'office se réfère à la capacité de l'Homme du métier pour :

  • Apprécier si l'objet revendiqué résulte d'une activité inventive au regard de l'état antérieur ; si la solution ne va "pas au-delà" des démarches manifestement attendues pour le spécialiste, la brevetabilité peut être refusée.
  • Vérifier la suffisance de la description : la divulgation doit permettre à la personne du métier de réaliser l'invention sans effort inventif excessif ni expérimentation inventive.
  • Déterminer si une caractéristique est implicitement divulguée par les documents antérieurs ou si elle constitue une piste inventive.

Exemples concrets et cas pratiques

Exemple 1 - Mécanique : un réfrigérateur intégré à un congélateur. Si l'intégration n'implique qu'une juxtaposition de composants connus sans adaptation technique non triviale, l'Homme du métier considérera la solution comme évidente et rejettera l'activité inventive.

Exemple 2 - Chimie : une nouvelle composition pharmaceutique qui nécessite un protocole expérimental particulier pour être stable. Si la description manque d'informations essentielles et que seul un travail d'essais répétés permet d'obtenir le composé, la suffisance de la description peut être remise en cause au regard de ce que la personne du métier pouvait raisonnablement réaliser.

Exemple 3 - Électronique : un assemblage de circuits connus mettant en œuvre une combinaison non triviale de paramètres. Si les paramètres optimaux ne découlent pas directement des publications antérieures et exigent une démarche inventive, l'activité inventive pourra être reconnue.

Conséquences pratiques pour les déposants

Pour convaincre que l'invention dépasse le niveau de l'Homme du métier, un dépôt doit comporter :

  • Une description détaillée et reproductible, incluant protocoles, conditions expérimentales ou données techniques permettant la mise en pratique sans recherches excessives.
  • Des exemples et variantes illustrant pourquoi la solution n'était pas évidente pour le spécialiste moyen.
  • Des revendications clairement rédigées, limitées aux caractéristiques effectives conférant l'apport technique.

En procédure d'opposition ou de nullité, les parties s'appuient fréquemment sur l'analyse de ce que l'Homme du métier aurait fait en combinant des documents antérieurs ; la question centrale devient alors savoir si la combinaison était "prévisible" ou nécessitait une créativité technique. Les conseils techniques et arguments doivent donc cibler précisément le niveau de compétence et les démarches raisonnablement attendues du spécialiste hypothétique.

Remarque finale

Dans la pratique contemporaine, l'expression tend à se féminiser sous la forme personne du métier pour refléter la neutralité de genre. Quel que soit le vocabulaire, la méthode reste identique : il s'agit d'un outil d'évaluation objectif qui articule le contenu d'une demande et l'état de la technique au regard des capacités d'un spécialiste moyen.